A nos gouvernants, à tous les acteurs politiques,
A tous nos concitoyens,
Aux personnes de bonne volonté,
« Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix » (Jn 14, 27)
Chers compatriotes,
Nous, Évêques du Sénégal, nous appuyant sur ces paroles de Notre Seigneur Jésus-Christ à ses disciples, nous rappelons que la paix est un don merveilleux et précieux de Dieu ; un don que les hommes doivent accueillir, préserver et promouvoir à tout prix. Ce rappel se fait plus que jamais pressant en ces moments où notre Nation se prépare à l’élection présidentielle du 24 février 2019.
Fidèles à notre responsabilité de pasteurs, hommes de Dieu, et à notre engagement citoyen, nous vous invitons tous au calme et à la sérénité devant les enjeux que suscite une telle étape de la vie de notre Nation.
Devant la gravité de l’enjeu, nous vous invitons tous à nous tourner vers Dieu, dans une prière fervente. Nous en appelons aussi à la conscience citoyenne de tous, surtout des acteurs politiques, pour adopter des comportements responsables et véridiques, en vue d’une élection crédible, transparente et paisible.
Par la même occasion, nous invitons tous les candidats à inscrire en priorité, dans leurs programmes, au-delà des rivalités politiques, un langage respectueux de l’autre et de la communauté, la vérité, la justice, la promotion du bien commun, dans l’intérêt de tous les citoyens.
Dans son Message du 1er Janvier 2019, à l’occasion de la Journée mondiale de prière pour la paix, le Pape François déclare que « la bonne politique est au service de la paix ». Il rappelle, à la suite du Pape Pie XI, que tout engagement politique véritable est une forme éminente de charité, par laquelle nous devons œuvrer pour préserver la cohésion sociale et la paix.
L’activité politique est un « service » qui ne saurait souffrir d’aucun des maux ou vices que voici :
- « la corruption – sous ses multiples formes d’appropriation indue des biens publics ou d’instrumentalisation des personnes -,
- la négation du droit et le non respect des règles communautaires,
- l’enrichissement illégal,
- la justification du pouvoir par la force ou par le prétexte arbitraire de la ‘’raison d’État’’,
- la tendance à s’accrocher au pouvoir,
- la xénophobie et le racisme,
- le refus de prendre soin de la Terre,
- l’exploitation illimitée des ressources naturelles en raison du profit immédiat,
- l’incitation à la violence,
- l’absence de vérité et de charité dans les propos,
- l’inexistence de perspective pour la promotion et l’insertion des jeunes. »
« Ces vices, nous dit le Pape François, affaiblissent l’idéal d’une authentique démocratie et mettent en danger la paix sociale ».
Avec le Saint-Père, nous croyons et soutenons que la noblesse de toute activité politique repose sur les valeurs suivantes :
- le respect fondamental de la vie, de la liberté et de la dignité des personnes,
- l’engagement pour le bien commun,
- le souci de la crédibilité et de la transparence,
- la promotion du dialogue, de la paix et de la cohésion sociale,
- l’engagement pour la justice, l’équité, le respect réciproque, la sincérité, l’honnêteté et la fidélité,
- le refus de toute discrimination sociale.
Confiants en la conscience citoyenne de tous les acteurs et en la maturité démocratique du Peuple sénégalais, nous recommandons fermement la vigilance pour préserver la paix sociale dans notre pays. Nous appelons toutes les populations au calme et à la retenue. Avec tous, nous disons : « Non à la violence ! » Ce pays nous appartient. Il est de notre devoir à tous de le protéger, de contribuer à son développement et à son rayonnement.
Dans la diversité des opinions et des choix, sachons rester sereins. Comme nous l’enseigne le Pape Benoit XVI, que nos « pensées, paroles et gestes créent une mentalité et une culture de paix, une atmosphère de respect, d’honnêteté et de cordialité »[1]
Nous lançons cet appel, d’une part, pour encourager toute initiative de dialogue en vue d’une paix sociale durable au service du développement, d’autre part, pour préserver notre SENEGAL de toute dérive avant, pendant et après l’élection. C’est notre responsabilité à tous.
C’est surtout la vôtre, chers acteurs politiques, vous qui descendez sur le terrain à la rencontre des populations. Que chacun d’entre vous, en poursuivant ses intérêts politiques, n’en sacrifie pas pour autant les droits et les intérêts des citoyens, surtout pas leur vie.
Que ceux qui ont en charge d’organiser le scrutin s’en acquittent avec honnêteté, impartialité et respect des normes.
Enfin, que la volonté de Dieu se manifeste dans le choix libre des populations !
Nous lançons cet appel en union avec nos frères musulmans du Sénégal, Chefs religieux, Imams et Oulémas.
Que Dieu, Créateur du monde, nous accorde la concorde et la paix, par l’intercession de la Très Sainte Vierge Marie, Notre Dame de Poponguine, Reine de la Paix.
Que Dieu bénisse le Sénégal !
Fait au Cap des Biches, le 16 janvier 2019
Les Évêques du Sénégal
[1] Joseph RATZINGER, Benoit XVI, Libérer la Liberté, Foi et politique, Editions Parole et Silence, Libreria Edictrice Vaticana 2018, p.164